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Date de création : 11.05.2014
Dernière mise à jour : 19.03.2015
22 articles


Extrait du roman "Au gré du vent"

Publié le 12/06/2014 à 16:16 par jeterlencre Tags : danse vie pensées fleurs femmes nuit fille jeune mode bleu roman mer monde homme
Extrait du roman "Au gré du vent"

 

Chapitre 1 : Le temps des rêves

 

Catalina Santoni eu dix-sept ans dans le courant de l’été 1735. C’était une magnifique jeune fille grande et élancée. Son visage angélique était illuminé par ses yeux bleus ciel et de jolis cheveux châtains ondulaient le long de son dos. Elle vivait non loin de la ville fortifiée de Porto Vecchio, en Corse, dans une maison de pierre confortable à côté de l’exploitation de son père, Antone, lequel cultivait des herbes aromatiques et quelques légumes qu’elle vendait ensuite au marché avec sa mère, Carla. La jeune fille avait toujours adoré se promener dans la petite exploitation familiale, en particulier dans la parcelle dédiée aux plantes aromatiques. Cet espace de verdure était éclaboussé par les rayons du soleil et Catalina aimait respirer à plein poumons les parfums enivrants qui s’échappaient des plantations. Lavande, thym, verveine, menthe, romarin, basilic… Elle distinguait chaque odeur au milieu de cette explosion de senteurs. Elle empruntait souvent le petit chemin parsemé de bruyères qui menait au cœur de l’un de ses endroits favoris : le maquis. Là, elle marchait insouciante, distraite par le chant des cigales… Elle évoluait alors entre des buissons à feuilles persistantes et toujours verdoyantes, des plans de lavandes, des genêts, des cistes, des myrtes et des « arbres à fraises », plus connus sous le nom d’arbousier. En passant à côté, elle cueillait toujours des arbouses, ces baies comestibles, bien qu’un peu fades. Son père lui défendait de se balader seule au milieu de cette végétation abondante et serrée qui avait la réputation de servir de refuge aux bandits. Mais Catalina n’avait pas peur, elle connaissait ces lieux depuis sa plus tendre enfance où déjà, elle bravait les interdits pour aller jouer à cache-cache avec sa petite sœur, Carulina. Ce qu’elle aimait par-dessus tout c’était le printemps, quand le maquis se muait en une étendue de fleurs multicolores dont les fragrances étaient balayées par les vents et portées bien au-delà du rivage… Mais le lieu qu’elle préférait entre tous, c’était une petite plage de sable blanc parcourue de pointes rocheuses et entourée de pins parasols. Elle était, certes, moins vaste que la plupart des autres plages de Porto Vecchio mais elle était toujours déserte et la jeune fille aimait les instants de solitude que cet endroit lui offrait. Elle humait avec plaisir l’air marin. C’était revigorant, vivifiant, apaisant… Assise sur le sable, songeuse, elle fixait l’eau turquoise et regardait attentivement le ballet qui se déroulait sous ses yeux. La danse des vagues l’émerveillait… La mer la fascinait. Elle voyait régulièrement des navires passer au large, ce qui éveillait en elle un profond désir d’évasion. Elle aimait l’île de beauté, cette terre sauvage était ancrée en elle, mais elle rêvait de voguer sur les océans, de découvrir de nouveaux horizons, de nouveaux visages, de nouveaux paysages… Elle avait la sensation d’être enfermée dans une vie qui n’était pas la sienne : l’autorité de son père l’étouffait. Elle l’avait toujours défié, se battant jour après jour pour sa liberté. Mais depuis plusieurs mois, il était obnubilé par l’idée de la marier. Il avait fini par donner sa main à un jeune homme issu d’une famille plutôt aisée, Larenzu Bartoli, un excellent parti selon lui. Aux yeux de Catalina il n’était qu’un homme quelconque, ennuyeux et prétentieux. Elle avait de suite exprimé un refus catégorique à son père qui l’avait giflée, la qualifiant d’insolente avant de déclarer d’un ton dédaigneux : « Les femmes c’est comme les miroirs, elles réfléchissent mais ne pensent pas. ». C’est à ce moment qu’elle commença à le détester. Cependant, le mépris que son fiancé lui inspirait n’était pas l’unique raison pour laquelle elle ne voulait l’épouser… Elle s’était éprise d’un jeune marin anglais de vingt-deux ans, John Adamson. Il était second sur un navire marchand. Lui et son équipage revenaient des Indes et avaient fait escale dans de grands ports de la Méditerranée afin d’y vendre leurs trésors exotiques. Ils avaient été contraints de faire une halte à Porto Vecchio pour caréner leur bateau. Le petit marché traditionnel de la ville s’était alors transformé en une véritable curiosité, il avait même attiré des habitants de Bonifacio ! Les échoppes exposaient des merveilles : des étoffes soyeuses semblables à celles qui habillaient les dames de la cour, des parures ornées de pierres étincelantes aux reflets tantôt azurs, tantôt orangés… Mais l’échoppe qui attira immédiatement l’attention de Catalina était celle qui contenait les épices. C’est ici que ses yeux rencontrèrent pour la première fois ceux de John et, instantanément, son cœur se mit à battre plus fort. L’anglo-saxon parlait bien le français. Il lui apprit les noms des différentes épices qu’il avait rapportées de son long périple et elle découvrit autant d’effluves méconnues jusqu’alors : du gingembre, également appelé « graine du paradis », des pistils de safran, des bâtons de cannelle, du cumin, des noix de muscade, et des clous de girofle. Seul le poivre ne lui était pas étranger. John restait à quai deux semaines. Il la courtisait et elle se laissa séduire… Ce jeune homme ayant navigué aux grés des vents avait réveillé en elle un désir irrémédiable : partir, car partir c’est vivre. C’était la seule issue possible pour échapper à la vie dénuée d’intérêt qui l’attendait si elle restait sur sa terre natale et ainsi, elle pourrait enfin découvrir le monde. Son unique regret était de laisser sa sœur chérie derrière elle bien qu’elle serait aux côtés de l’homme qu’elle aimait. Il était si différent de tous ceux qu’elle avait rencontrés auparavant… C’était un homme cultivé ; il lui fit part de ses lectures, lesquelles passionnaient la jeune fille ayant appris à lire à l’âge de treize ans grâce à son oncle lettré, Lisandru, qui avait toujours adoré cette nièce curieuse et déterminée. En outre, il était séduisant : il avait un joli visage où pétillaient des yeux noisette. Elle ne put résister à l’envie d’embrasser ses lèvres fines et de glisser sa main dans ses cheveux auburn… Pour la première fois de sa vie, Catalina était vraiment amoureuse, et c’est d’un commun accord que les deux tourtereaux avaient décidé qu’elle embarquerait avec le jeune homme à bord du Ocean’s Call, un splendide galion. Ils se donnèrent donc rendez-vous le 6 août, à la tombée de la nuit, sur le lieu où la jeune fille était si souvent venue contempler la mer. Catalina, assise à sa place habituelle, observait l’immense miroir bleu marine où se reflétaient les lueurs de la lune. Ses yeux étaient aussi brillants que l’astre de la nuit. Elle attendait avec impatience l’arrivée de son soupirant. Des milliers de pensées se bousculaient dans sa tête. Son souhait le plus cher était sur le point de devenir réalité : demain à l’aube, elle prendrait le large à bord d’un superbe navire anglais ; dès lors, elle vivrait des aventures extraordinaires et percerait les mystères des océans et des contrées aussi lointaines qu’insolites… Soudain, elle vit des silhouettes sombres s’approcher. Il n’était pourtant pas convenu que des membres de l’équipage accompagneraient John… Elle dévisagea les trois ombres qui venaient vers elle avant de se rendre à l’évidence : John n’était pas là. Aussitôt, elle se mit à courir le plus vite qu’elle le pouvait. Des questions se succédaient dans son esprit à une vitesse folle : « Pourquoi n’est-il pas venu ? », « Qui sont ces hommes ? », « Que me veulent-ils ? »… Les efforts de la jeune fille furent vains. L’un de ses poursuivants l’attrapa violemment par le bras avant de la jeter à terre. Elle ne distinguait pas bien ses agresseurs dans l’obscurité. Il lui sembla qu’ils étaient habillés à la mode ottomane : elle devina leurs turbans et leurs pantalons bouffants ainsi que les sabres qu’ils portaient à la ceinture. Elle se débâti de toutes ses forces, ses appels aux secours stridents déchirèrent la nuit noire, mais elle fut bientôt réduite au silence par les coups frénétiques dont elle fut rouée. Elle était épuisée, à bout de souffle. Incapable de lutter, elle n’eut d’autre choix que de se laisser emmener par ses ravisseurs. Elle avait le nez ensanglanté et une douleur lancinante lui parcourait le corps. Elle réprima son envie de fondre en larme par dignité, mais c’est les yeux brillants de chagrin qu’elle découvrit la galère qui la conduirait tout droit aux portes de l’enfer. L’avenir radieux qu’elle avait naïvement imaginé depuis des jours laissait place à d’amers remords. La terre s’était écroulée sous ses pieds, la plongeant dans le gouffre du néant. Ses espoirs déchus donnèrent naissance à des questions angoissantes, spectres infernaux hantant son esprit en détresse : John l’avait-il trahi ? Son cœur refusait d’y croire, elle s’était trouvée au mauvais endroit au mauvais moment, non ? Qu’allait-il advenir d’elle à présent ? Quel supplice lui réservait-on ? Une seule certitude apparaissait au milieu de toutes ces interrogations : malgré les fortifications qui protégeaient la ville, malgré le fait que la Corse n’ait pas été attaquée par les corsaires barbaresques depuis près de deux cents ans, ceux-ci continuaient de sévir en Méditerranée et les côtes italiennes n’étaient pas leurs seules victimes. Ils frappaient là où on ne s’y attendait pas, tels des rapaces, attendant le moment propice pour surprendre leur proie et lui asséner le coup fatale. Catalina, jeune fille corse, rebelle et insouciante, était désormais leur captive.